Est-il permis d’acheter un bien ou un service sans que le vendeur ne dise ‘’je te vends ceci ‘’ et que l’acheteur ne confirme en disant ‘’je t’achète ‘’ si on est sûr qu’il ne ramènera pas l’article ?
Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :
Les paroles prononcées par le vendeur et l’acheteur en disant : je te vends… je t’achète, et tout autre formule de ce genre est appelé par les savants : la formulation de la vente. Or, les ventes peuvent se faire sous deux formulations. Verbalement ou par les actes. La formulation verbale d’une vente est désignée par les termes arabes de Îjâb et de Qabûl, soit la proposition de la vente et l’acceptation de l’achat.
Ce qui est appelé Al-Îjâb est la formulation verbale émanant du vendeur indiquant qu’il vend ce qu’il possède. Alors que la Qabûl est la formulation verbale de l’acheteur qui indique qu’il est d’accord pour acheter ce que possède le vendeur.
La formulation de la vente par les actes correspond à la volonté des deux parties de conclure la vente sans qu’aucun des deux ou que l’un des deux seulement ne prononce rien du tout pour le faire savoir. C’est le cas si le vendeur pose la marchandise sur l’étalage et que l’acheteur s’en saisit, que le vendeur prend possession de l’argent. Dans ce cas, l’échange de la marchandise contre l’argent tient lieu de formulation verbale puisque l’attitude des deux indiquent qu’ils sont d’accord pour conclure cette vente.
Les savants divergent concernant la validité de cette forme de vente. La plupart considère que cela est valide mais d’autres l’interdisent de façon générale.
L’avis qui est de vigueur chez les savants de l’école Shâfi’ite est que cela est interdit. Dans son livre Fath Al-‘Azîz, Al-Râfi’i a dit : « La formulation verbale des deux parties doit être prise en ligne de compte parce que c’est ceci qui renseigne sur l’accord en leur for intérieur. L’échange de marchandise contre l’argent n’est pas suffisant. »
Al-Khatîb Al-Sharbînî dit dans son Mughnî Al-Muhtâj : « On a besoin d’exiger la formulation verbale des deux parties pour valider la vente parce que celle-ci est corrélée à leur accord … Or, on ne peut savoir s’ils sont réellement d’accord puisque cela est propre au for intérieur de chacun et personne ne peut le savoir. Le statut de la vente a donc été lié aux apparences et donc à la formulation verbale des deux parties. La vente n’est pas valide uniquement avec l’échange de la marchandise contre l’argent. » Fin de citation.
La plupart des savants disent que la vente est valide s’il y a uniquement échange de marchandise contre l’argent. Ibn Mâza Al-Hanafî a dit dans Al-Muhît Al-Burhânî Fî Fiqh Al-Nu’mânî : « Une vente est conclue s’il y a uniquement échange de marchandise contre l’argent sans même qu’il n’y ait eu de formulation verbale de la part du vendeur et de l’acheteur. C’est ainsi que toutes les versions s’accordent. Le principe de base pour statuer de tels cas est de revenir aux pratiques et aux usages en vigueur chez les gens. »
Al-Khalîl Al-Mâlikî a dit dans son Mukhtasar : « La vente est conclue si un élément indique que les deux parties sont d’accord, même si c’est seulement en échangeant la marchandise contre l’argent. » Fin de citation.
Dans le livre Al-Madkhal Fî Al-Fiqh Al-Mâlikî de Ibn Al-Hâj, il est dit : « L’avis de Mâlik est qu’il est permis de conclure une vente uniquement en échangeant la marchandise contre l’argent en se les échangeant de main à main sans qu’aucun des deux ne disent quoi que ce soit. » Fin de citation.
Al-Mardâwî a dit dans Al-Insâf Fî Madhhab Al-Imâm Ahmad : « L’avis le plus juste de ceux émis par les savants de notre école est qu’une vente conclue par un échange de marchandise contre de l’argent est valide dans tous les cas de figure et c’est l’avis de la plupart des savants de notre école. Et c’est aussi selon cet avis qu’ils agissent. » Fin de citation.
Il nous semble – et Allah sait mieux que quiconque – que l’avis indiquant qu’une vente est valide uniquement à la suite d’un échange de marchandise contre de l’argent entre le vendeur et l’acheteur sans qu’aucun des deux ne prononcent le moindre mot est le plus juste des deux émis par les savants. Ceci en raison de l’absence de preuves explicites exigeant une formulation verbale de la proposition de vente et de l’accord de l’acheteur. Mais aussi, parce que l’avis auquel nous nous rangeons accorde plus de facilité aux gens et enfin parce que ce sont les usages en vigueur.
Remettre une marchandise dans les mains d’un client qui donne en même temps la somme pour le payer est une preuve que les deux parties sont d’accord pour conclure la vente même si cela n’est pas formulé verbalement. Al-Hattab Al-Mâlikî a dit dans Mawâhib Al-Jalîl : « C’est une preuve de leur consentement selon les usages en cours et cela est suffisant puisque l’objectif du commerce est de prendre possession de ce que l’autre possède et de lui donner en échange ce qu’il accepte en le faisant de bon cœur. Le fait que cela soit d’usage d’agir ainsi est suffisant pour indiquer que les deux parties le font de bon cœur et qu’ils acceptent tous les deux cette transaction par leur acte ou leurs propos même si l’acte en question est uniquement l’échange de la marchandise contre l’argent. » Fin de citation.
Et Allah sait mieux.
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