J'ai lu dans le livre Fadâ'il Al-A'mâl (livre du groupe al-Tablîgh), dans le chapitre intitulé al-Sadaqa wa-l-Hadj, l'histoire du cheikh Khayr Nûr Bâq. Cette histoire raconte que le cheikh fut informé de sa mort huit jours avant celle-ci. Le cheikh dit : « Je vais mourir dans l'après-midi de jeudi au moment de la prière du Maghreb et je serai enterré après la prière du vendredi... » Ensuite, l'histoire continue et le narrateur dit avoir été informé le vendredi matin par un homme de la mort du cheikh... Cela démontre que cette personne connaissait l’invisible alors qu'Allah, exalté soit-Il, dit à la fin de la sourate Luqmân (Luqman) qu'Allah est le Seul à connaître le moment de la mort d'une personne. D'après mes connaissances, cette histoire est considérée comme du polythéisme majeur, car elle va à l'encontre du Coran et des hadiths. J'ai alors mentionné cette histoire à un membre du groupe d’al-Tablîgh qui a gardé le silence après sa lecture avant de me dire qu'il allait se renseigner à ce propos auprès d'un cheikh. Le lendemain, cette personne m'a dit que le cheikh lui avait dit qu'il ne s'agissait pas de polythéisme, mais qu'Allah dévoile à qui Il souhaite parmi Ses bien-aimés (Awliya’) des choses par lesquelles Il les honore. Je me renseigne donc également auprès de vous. Pourquoi ces soufis disent-ils qu'il ne s'agit pas de polythéisme, mais simplement d'informations qu'Allah fournit à Ses bien-aimés ? Si ceux-ci peuvent avoir accès à toute information relative à l’invisible, qu'est-ce donc que le polythéisme ? Pouvez-vous m'indiquer s'il s'agit de polythéisme ? Ai-je raison ou pas ?

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :

Le livre intitulé Fadâ'il al-A'mâl rédigé par le cheikh Muhammad Zakariyâ al-Kândahlawî n'est pas un livre fiable concernant les questions de dogme, car il contient des avis en contradiction avec celui des adeptes de la Sunna et pour lesquels il s'appuie sur des hadiths mawdû' (inventés). En particulier, il affirme que le Prophète () aurait autorisé le Tawassul (supplication/imploration d'Allah par l'intercession d'un intermédiaire). Il s'appuie à ce sujet sur le hadith mawdû' dans lequel Adam aurait reconnu sa faute en disant : « O Seigneur, je T'implore par Mohammed... » Or, les savants déclarèrent ce hadith mawdû'. Parmi ces savants figurent entre autre al-Dhahabî et al-Albânî, qu'Allah leur fasse miséricorde. D’autre part, on trouve dans la chaîne de transmission de ce hadith Abdurahmân ibn Zayd ibn Aslam qui est un narrateur da'îf (faible) à l'unanimité des savants. Mâlik, Ahmad, Ibn Ma'în, Ibn al-Madinî et d'autres, qu'Allah leur fasse miséricorde, le déclarèrent faible au point qu'Ibn al-Djawzî déclara qu'il y avait unanimité des savants sur sa faiblesse.

En résumé, il n’est pas conseillé de lire ce livre. Quant à l'histoire que vous avez rapportée à propos de ce cheikh qui informa de sa mort huit jours avant celle-ci, il s'agit là d'un exemple de ce que contient ce livre et qui va à l'encontre de ce que rapporte le Coran. En effet, si ce cheikh a dit de cela d'une manière catégorique, cela revient à prétendre qu’il connaît l’Invisible, or Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset) : « [...] et nulle àme ne sait en quelle terre il mourra. [...] » (Coran 31/34) Aïcha, , a dit : « Quiconque te dit connaître ce qui se produira demain a certes menti. » Par contre, si cet homme a dit cela en présentant cela comme une conjecture, en raison d'un songe qu'il avait eu ou autre, cela peut se produire et n'est en rien contradictoire avec le fait que la connaissance de l’Inconnaissable (ghayb) reste une prérogative d’Allah.

Concernant vos dires selon lesquels Allah dévoile des choses à Ses bien-aimés, la réponse est la Parole d’Allah, exalté soit-Il, (sens des versets) :
«Car c’est Lui Qui Connaît l’Inconnaissable (ghayb), et Il ne dévoile Ses secrets à personne, excepté à ceux qu’il aura agréés comme Messagers, […]. » (Coran 72/26-27)

Ainsi, Allah ne dévoile rien de l’Inconnaissable à personne sauf à un de Ses messagers à qui Il en dévoile ce qu'Il désire, car les messagers sont dotés de miracles dont celui d’informer de certaines choses inconnaissables.

Par contre, en dehors d'eux, nul ne peut prétendre savoir de quoi sera fait le futur sauf à titre conjectural en raison d'un songe ou d'une inspiration. Le livre intitulé al-Tahrîr wa-l-Tanwîr mentionne à propos de l'exégèse des versets précédents de la sourate al-Djinn (Les Djinns) : « Ce dévoilement de l’Inconnaissable à certains messagers dont il est question désigne le vrai dévoilement qui apporte une connaissance, comme la faculté de la perception directe, et ces versets ne désignent pas les rêves prémonitoires ou l’inspiration qui arrivent à certains pieux. Le Prophète () a dit :
"Parmi les nations qui vous ont précédés figuraient des hommes qu’Allah inspirait et s'il devait y en avoir un dans ma communauté, ce serait 'Umar." (Mouslim) »

Et Allah sait mieux.