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Les récits attribués à Nu'aymān ne sont pas authentiques

Question

As salam alaykum wa Rahmatullah wa barakatuh. J’ai lu des histoires sur le sahabi An-Nu’ayman Ibn Amr radi allahu anhu. Mais je me demande comment mettre en corrélation les plaisanteries qu’ils réalisaient et qui étaient appréciées avec le hadith du Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) mentionnant le malheur pour celui qui ment pour faire rire. Je pense par exemple a l’histoire avec Suwaybit radiallahu anhu ou l’histoire avec Makhramah radiallahu anhu.

Réponse

Louange à Allah et que la paix et la bénédiction soient sur Son Prophète et Messager, Mohammed, ainsi que sur sa famille et ses Compagnons :

Votre question est pertinente, et la réponse brève est que ces récits ne sont pas authentiquement attribués à Nu'aymān. Examinons les deux cas mentionnés :

1. Le récit de Nu'aymān avec Mukhrama et 'Uthmān est rapporté par Al-Zubayr ibn Bakkār dans son livre Al-Fukāha wa-l-Mizāḥ.
Mais sa chaîne de transmission (isnād) est coupée (munqaṭiʿ) : en effet, Al-Zubayr le rapporte de son oncle 'Abdullāh ibn Muṣʿab qui le tient de son grand-père [sans mentionner l'intermédiaire entre 'Abdullāh ibn Muṣʿab et grand père Mukhrama]. Mukhrama est un Compagnon (décédé en 54 H.), or, 'Abdullāh ibn Muṣʿab est né en 111 H. (soit 57 ans après la mort de Mukhrama), et il n'a pas précisé sa source.
En plus ce même 'Abdullāh ibn Muṣʿab est jugé faible (ḍaʿīf) par Ibn Maʿīn (comme cité dans Mīzān al-Iʿtidāl).
En conclusion : Ce récit ne peut servir de preuve (lā ḥujja fīhi) car il cumule deux défauts majeurs en sciences du hadith :
• Problème de continuité dans la chaîne (saqṭ fī l-sanad).
• Critique d'un narrateur (ṭaʿn fī r-rāwī).
Comme le souligne Ibn Ḥajar dans Nuzhat al-Naẓar : « Un hadith est rejeté soit pour une rupture dans la chaîne, soit pour un défaut chez un narrateur. »
Même si le récit était confirmé, il faudrait :
• Soit l'interpréter de manière compatible avec l'interdiction du mensonge (même en plaisantant).
• Soit le rejeter s'il contredit les principes établis.

2. Le récit de Suwaybiṭ (que vous avez mentionné)
Il est rapporté par Aḥmad (Musnad), Ibn Mājah (Sunan), et Isḥāq ibn Rāhwayh (Musnad), tous via Zamʿa ibn Ṣāliḥ Al-Zuhrī et il souffre lui aussi de deux défauts majeurs
• Problème d’incohérence : Chez Ibn Mājah et Isḥāq : Nu'aymān aurait joué un tour avec les provisions. Chez Aḥmad, Suwaybiṭ en serait l'auteur.
Il y’a donc une inversion (qalb) de rôle inexplicable, bien que la chaîne soit identique (via Zamʿa).
• Faiblesse du narrateur-clé :
Zamʿa ibn Ṣāliḥ est jugé faible (ḍaʿīf) par Aḥmad, Al-Bukhārī, Abū Dāwūd, Abū Zurʿa (cf. Tahdhīb al-Tahdhīb).
Al-Būṣīrī (Miṣbāḥ al-Zujāja) précise : « Chaîne faible. Zamʿa, bien que cité par Muslim, mais il ne l’a pas cité seul : il l’a cité en compagnie d’un narrateur fiable (maqrūnan bi-ghayrihi). Les imams l'ont affaibli. » Al-Albānī le classe aussi comme faible (Ḍaʿīf Ibn Mājah).

Al-Dhahabī (Tārīkh al-Islām) a jugé ce hadith "ḥasan", mais son avis est marginal face aux critiques convergentes sur Zamʿa. De plus ce récit contredit l'interdiction d'effrayer un musulman, même pour rire, comme le prouve le hadith authentifié par Al-Albānī : « Il n'est pas permis à un musulman d'effrayer un autre musulman. » (Aḥmad, Abū Dāwūd).

En conclusion : les deux récits sur Nu'aymān sont faibles. Ils ne peuvent donc pas contredire les preuves claires interdisant le mensonge, même humoristique (hadith de Bahz ibn Ḥakīm, ḥasan) et le fait d’effrayer un musulman. Rappelons que le Prophète () a dit :
« Malheur à celui qui ment pour faire rire les gens ! Malheur à lui, malheur à lui ! » (Aḥmad, Abū Dāwūd, Tirmidhī – ḥasan).
Al-Ṣanʿānī explique ce hadith dans son livre Al-Tanwīr en ces termes : « Le mensonge est déjà harām, mais y ajouter le rire aggrave son interdiction. D'où la répétition du "malheur". »

Et Allah sait mieux.

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